Bon, petit break de fin d’année.
On m’a proposé hosto tout confort, activité standing de traitement tumoral.
C’est pas donné, je vous jure. Quatre mille euros la nuit. Surtout pour des prestations de série : repos, toilette, petit déjeuner, soins, kiné, déjeuner, repos, télé, sieste, goûter, repos, dîner à 18 H, et Patrick Sébastien à la télé, avec qui on s’endort de nos yeux fatigués.
Vous marrez pas, c’est vous qui payez.
C’est vrai, on a quelques avantages. On nous fait le lit, le ménage, la vaisselle, et même, parfois, la toilette et les massages ! Des vacances, je vous dis. Enfin presque… Il manque l’évasion tout de même. Celle-là même qui nous éloigne, un peu, de la maladie. Juste ce qu’il faut pour revenir plus forte, plus déterminée à affronter ce crabius de merdus.
Alors, comment agrémenter ce petit séjour à deux ? Je veux dire, le crustacé et moi.
Ben avant, il y avait les visites de l’après-midi et Rintintin en noir et blanc sur une seule chaîne.
Le compagnon d’infortune, partageant sa chambrée, les fois où il pouvait encore parler.
Il y avait le gros téléphone à fil, si t’avais eu le réflexe de faire ouvrir la ligne. Qui te faisait tomber du lit au retentissement de sa sonnerie.
Le livre que tu avais eu le courage de poser sur la petite table, et rarement de l’ouvrir.
Quelques fois, nos doudous apportaient un précieux réconfort.
Bon, c’était avant.
Avant l’invention de nos téléphones portables multifonctions. Ceux que l’on ne lâche qu’en cas de force majeur. Dont on est souvent trop épuisé pour pouvoir l’utiliser. Confisqué parfois par des membres du corps médical malgré d’intenses négociations. Il faut admettre, qu’un Smartphone au bloc op, ce n’est pas très top. Et en radiologie, pour un scanner, c’est pas très net ! Soyons raisonnables !
Maintenant, il y a cet outil. Celui que l’on utilise trop et qui nous isole les uns des autres quand on pourrait juste se déplacer. Mais tout est question de contexte n’est-ce pas ? Car en congé forcé, même dans une magnifique chambre blanche, celui-ci nous rapproche, nous lie par cette onde invisible avec le monde des heureux, si loin de notre quotidien hospitalier.
C’est ainsi, qu’à n’importe quelle heure du jour ou de la nuit, tout devient possible, comme un selfie de notre gueule, cassée, mais vivante !
Sabrina LE BARS & Max KRIEF
Ma gueule ? Et alors ?
Ma gueule ? Et alors ?
C’est ma gueule !
Quoi, ma gueule ?
Quel objet pourrait symboliser ton parcours ?
Mon portable.
Alors, mon portable… ça a été mon lien avec le monde extérieur pendant toute ma période d’hospitalisation, qui a été très longue. La radiothérapie, ensuite…, qui a été un moment très difficile, où on est coupé des gens… parce que c’est… c’est tous les jours, en fait. Et… et même pendant l’hospitalisation, quand on m’a opérée, quand on a fait la chirurgie sur moi…, ça m’a permis tout de suite de reprendre contact avec le monde extérieur, de voir que le monde s’arrêtait pas en fait à ça ! Et… de pouvoir… communiquer, m’exprimer, garder un lien en fait avec la réalité, ce qui était pas évident, en fait, à ce moment-là…, voilà ! Moi, ça m’a permis de… de m’extérioriser, de… de pouvoir… de pouvoir garder mon… une sorte de contrôle en fait sur… sur les choses même si c’est complètement illusoire mais ça… ça m’a permis d’être… voilà ! De… de pouvoir… de pouvoir m’exprimer et… d’ailleurs, la première chose que j’ai faite en me réveillant, c’était de… d’imposer à mes… à mes amis un selfie post-op ! (rires) Et… ça a été un moment très fort parce que… parce que j’avais la gueule complètement cassée et… et en même temps, je voulais montrer que, ben ouais, je… je suis encore là et… je suis… je suis toujours… c’est toujours moi, je suis encore là et… c’est pas parce que… j’ai cette gueule-là que… que je suis différente !
Making off
- La bretelle qui sort… et quand on le baisse…
- Ah ben ça, voilà ! Ah ben… faut faire 1m60 pour le comprendre !
(rires)