Annonce du diagnostic

Pili­er du dis­posi­tif d’annonce, le ren­dez-vous des­tiné à évo­quer le diag­nos­tic de can­cer con­stitue un moment d’échange priv­ilégié entre le patient et son/ses médecins. Quels sont les dif­férents points abor­dés ? Com­ment gér­er toutes les infor­ma­tions délivrées ? Le point avec le Dr Este­ban Brenet, spé­cial­iste en chirurgie can­cérologique et recon­struc­trice ORL au CHU de Reims.

E. Brenet - annonce diagnostic

Instau­ré par le Plan can­cer 2003–2007, le dis­posi­tif d’annonce englobe tout un ensem­ble de ren­dez-vous des­tinés à apporter des infor­ma­tions claires et pré­cis­es au patient sur la mal­adie qui lui a été diag­nos­tiquée et sur le déroulé des traite­ments à venir. Toutes ces con­sul­ta­tions œuvrent à un objec­tif com­mun : béné­fici­er d’une prise en charge de qual­ité au moment de l’annonce de la mal­adie, aider à assim­i­l­er la masse d’informations médi­cales, favoris­er l’implication dans les soins. 

Un temps de « pré-annonce »

« La sus­pi­cion de can­cer est sou­vent évo­quée en amont de la con­sul­ta­tion d’annonce pro­pre­ment dite. C’est le cas quand les patients vien­nent effectuer une biop­sie pour éval­uer une masse sus­pecte, quand nous les recevons pour pro­gram­mer dif­férents exa­m­ens des­tinés à déter­min­er l’étendue de cette lésion », détaille le Dr Este­ban Brenet, Maître de Con­férence Uni­ver­si­taire et Prati­cien Hos­pi­tal­ier au CHU de Reims. « S’ils nous deman­dent le but de ces exa­m­ens, il est préférable de jouer franc jeu et d’expliquer que nous cher­chons à savoir si cette masse est can­céreuse ou non. Cela pré­pare large­ment à la con­sul­ta­tion d’annonce ultérieure. »

Il n’est pas rare que des patients suiv­is par un ORL de ville ait déjà reçu l’information con­fir­mant la nature can­céreuse de leur tumeur avant d’être reçus dans un ser­vice d’oncologie pour la con­sul­ta­tion d’annonce. Le chirurgien cer­vi­co-facial souligne : « Avant d’affirmer un diag­nos­tic de can­cer, il faut a min­i­ma en avoir la cer­ti­tude his­tologique. Dans l’idéal, selon mon pro­pre avis, il est préférable d’avoir dans le même temps une prise en charge à pro­pos­er au patient. »

« La sus­pi­cion de can­cer est sou­vent évo­quée en amont de la con­sul­ta­tion d’annonce pro­pre­ment dite. »

Comment se passe une consultation d’annonce ?

Ce ren­dez-vous est générale­ment long, en rai­son du nom­bre de points à abor­der. En amont, plusieurs pro­fes­sion­nels de san­té se sont rassem­blés au cours d’une Réu­nion de Con­cer­ta­tion Pluridis­ci­plinaire ou RCP, au cours de laque­lle ils analy­sent l’ensemble des résul­tats d’examens et déter­mi­nent les pro­to­coles de traite­ment les plus adaptés.

« La con­sul­ta­tion d’annonce est plan­i­fiée assez rapi­de­ment après les exa­m­ens. En tout, nous avons cinq semaines entre la pre­mière fois où nous ren­con­trons le patient et le moment où doit être réal­isée la chirurgie ORL. C’est pourquoi il faut aller très vite », indique le Dr Brenet. Très cadrée, la con­sul­ta­tion d’annonce s’articule en qua­tre temps : 

  • Le pre­mier temps est dédié à éval­uer la représen­ta­tion de la sit­u­a­tion par le patient : Sait-il ce qu’il vient faire là ? Que lui a‑t-on déjà dit ? Qu’en a‑t-il retenu ? « Nous étab­lis­sons en quelque sorte un état des lieux de ses con­nais­sances, afin d’adapter la suite de notre dis­cours. Cette par­tie de la dis­cus­sion peut amen­er le patient à évo­quer lui-même le can­cer », développe le Dr Brenet.
  • Dans un sec­ond temps, vient la ver­bal­i­sa­tion du mot « can­cer » : « Il doit être dit et surtout com­pris et refor­mulé par le patient. »
  • Le troisième temps cor­re­spond au déroulé du traite­ment. « Nous évo­quons toutes les étapes, de manière rel­a­tive­ment sim­ple car elles seront détail­lées de nou­veau par la suite. Mais il faut don­ner tout de même l’ensemble des infor­ma­tions et surtout un plan­ning de ces soins. Pour aider à mieux visu­alis­er, les fris­es chronologiques ou les sché­mas sont très utiles. » De toutes ces don­nées découle le pro­gramme per­son­nal­isé de soin (PPS), remis sys­té­ma­tique­ment à l’issue de la con­sul­ta­tion. Le droit à un sec­ond avis doit être évo­qué à cette étape de la con­sul­ta­tion, sans que celui-ci ne retarde la prise en charge des soins.
  • Le dernier temps du ren­dez-vous ouvre sur l’encadrement pro­posé pen­dant toute la durée du par­cours de soin. « Nous expliquons qu’une autre con­sul­ta­tion, très prochaine, sera pro­gram­mée avec l’infirmier en pra­tique avancée. Pour les cas où une laryn­gec­tomie totale ou par­tielle est envis­agée ou lorsqu’une recon­struc­tion com­plexe aura lieu, il fau­dra une con­sul­ta­tion avec un ortho­phon­iste. Pour tous les can­cers ORL, nous inclu­ons aus­si un suivi immé­di­at avec un diététi­cien. » La coor­di­na­tion avec le médecin trai­tant est évo­quée en fin de con­sul­ta­tion, tout comme les numéros de télé­phone à con­tac­ter en cas de questions.

« Le mot “can­cer” doit être dit et surtout compris. »

Quels professionnels de santé peuvent mener cette consultation d’annonce ?

C’est le médecin en charge de la mise en œuvre du pro­jet thérapeu­tique qui a la respon­s­abil­ité de recevoir le patient pour la con­sul­ta­tion d’annonce. Il peut arriv­er que plusieurs médecins impliqués dans les traite­ments soient présents : onco­logue, chirurgien, radiothérapeute…

Les étu­di­ants en médecine béné­fi­cient désor­mais d’une for­ma­tion sys­té­ma­tique au dis­posi­tif d’annonce durant leur cur­sus. « Nous organ­isons égale­ment des séances de sim­u­la­tion. Ces cas clin­iques font par­tie des sit­u­a­tions qui peu­vent tomber à l’oral lors de l’examen nation­al clas­sant en fin de six­ième année », informe le spé­cial­iste en chirurgie ORL.

Les autres rendez-vous majeurs du dispositif d’annonce

« Très rapi­de­ment après la con­sul­ta­tion d’annonce, le patient est reçu par un infir­mi­er en pra­tique avancée pour la con­sul­ta­tion de refor­mu­la­tion », reprend le Dr Este­ban Brenet. « Il faut véri­fi­er que tout a été com­pris, bien dévelop­per la suite, les dif­férents suiv­is médi­caux et paramédi­caux. Cette sec­onde con­sul­ta­tion per­met aus­si de détecter des fragilités du patient, de l’orienter si besoin vers un psy­cho­logue, une assis­tante sociale, un addic­to­logue pour met­tre en place un sevrage tabag­ique ou alcoolique.… »

Les autres ren­dez-vous paramédi­caux d’accompagnement per­me­t­tent de refor­muler à nou­veau les dif­férentes infor­ma­tions et de détailler les traite­ments, en quoi ils con­sis­tent, ce qu’ils impliquent. Ain­si, les ortho­phon­istes jouent un rôle majeur dans la com­préhen­sion des chirur­gies sou­vent lour­des des­tinées à traiter un can­cer des voies aérodi­ges­tives supérieures : « À l’aide de sché­mas, ils peu­vent ré-expli­quer en quoi con­sis­tent une laryn­gec­tomie ou une mandibulec­tomie, com­ment sont effec­tuées les recon­struc­tions, com­ment se déroulera la réé­d­u­ca­tion… »

Dif­férents ren­dez-vous paramédi­caux suiv­ent la con­sul­ta­tion d’annonce, selon les besoins éval­ués au cas par cas. Pour les can­cers de la tête et du cou, un suivi en nutri­tion s’impose avant même de débuter les traite­ments.

« Les autres ren­dez-vous paramédi­caux d’accompagnement per­me­t­tent de refor­muler à nou­veau les dif­férentes infor­ma­tions et de détailler les traite­ments »

Comment gérer l’annonce du diagnostic et des traitements ?

« La pre­mière étape de la con­sul­ta­tion d’annonce est des­tinée à adapter le dis­cours médi­cal en fonc­tion de ce que le patient sem­ble en capac­ité d’entendre. Le diag­nos­tic du can­cer doit tou­jours être don­né à ce moment-là. En revanche, si nous voyons que la per­son­ne en face de nous est déjà son­née, nous pou­vons prévoir une sec­onde con­sul­ta­tion pour dévelop­per les traite­ments », recon­naît le chirurgien ORL.

La place des proches est pri­mor­diale pour pass­er ce cap si dif­fi­cile du diag­nos­tic. Beau­coup de médecins les inviteront d’ailleurs à par­ticiper aus­si à ce ren­dez-vous, si le patient est d’accord. « Les accom­pa­g­nants jouent un rôle essen­tiel pour retenir les infor­ma­tions, pos­er des ques­tions. Je demande tou­jours s’il y a d’autres mem­bres de la famille qui devraient être infor­més, s’il y a des enfants. Je con­seille de par­ler le plus pré­co­ce­ment pos­si­ble avec les proches du diag­nos­tic de can­cer, bien évidem­ment pour ceux qui le souhait­ent. Si nos patients nous deman­dent com­ment l’évoquer, nous pou­vons en dis­cuter avec eux, leur don­ner des clés, des out­ils. Nous pou­vons même leur pro­pos­er de les revoir avec d’autres mem­bres de la famille si nécessaire. »

« Si nos patients nous deman­dent com­ment évo­quer le diag­nos­tic avec leurs proches, nous pou­vons en dis­cuter avec eux, leur don­ner des clés, des outils. 

Cha­cun réa­gi­ra à sa manière face à un diag­nos­tic de can­cer ORL, à l’explication des pro­to­coles de soins, à l’évocation des effets sec­ondaires éventuels et des dif­férents suiv­is néces­saires. L’urgence au moment du diag­nos­tic est tou­jours de démar­rer les traite­ments le plus rapi­de­ment pos­si­ble. Les accom­pa­g­ne­ments psy­chologiques et paramédi­caux sont mis en place très tôt. Le Dr Brenet con­clut avec une autre source d’aide pré­cieuse, qui peut inter­venir dès le début des soins ou bien plus tard : les asso­ci­a­tions de patients comme Coras­so. « Le lien avec des patients pairs peut être très utile pour sur­mon­ter cer­taines dif­fi­cultés, pour mieux com­pren­dre cer­tains effets indésir­ables, pour trou­ver des solu­tions pour les surmonter. »

Pro­pos recueil­lis par Vio­laine Badie

Décou­vrez les témoignages de ces patients qui nous racon­tent leur con­sul­ta­tion d’annonce

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