Lorsque l’alimentation par voie orale est compliquée voire impossible, une gastrostomie peut être mise en place. En quoi consiste cette intervention ? Quelles sont ses indications ? Le point avec le Dr Nathalie Ho-Hio-Hen, médecin nutritionniste à Gustave Roussy à Villejuif.
La gastrostomie, qu’est-ce que c’est ?
C’est une intervention mini-invasive qui consiste à mettre en place une sonde au niveau de l’estomac, pour permettre au patient de recevoir une nutrition entérale, c’est-à-dire l’apport de nutriments directement dans l’estomac. On peut également y recourir en complément de l’alimentation orale, pour administrer des médicaments ou pour hydrater.
Il s’agit d’un tube souple, en silicone, de 35 cm de long et 5.3 mm de diamètre, placé directement dans l’estomac, à travers la peau.
La sonde est maintenue dans l’estomac grâce à un ballonnet qui est gonflé avec de l’eau.
La pose, qui dure une quarantaine de minutes, se déroule sous anesthésie locale dans le bloc opératoire de radiologie interventionnelle. L’hospitalisation dure 4 jours (3 nuits à l’hôpital).
Quelles sont ses principales indications ?
La gastrostomie est particulièrement indiquée lorsque l’alimentation par voie orale n’est pas possible ou ne permet plus de s’alimenter suffisamment. L’objectif est de maintenir des apports nutritionnels et de limiter tout risque de dénutrition, avant ou pendant les traitements, qu’il s’agisse de chirurgie, de radiothérapie ou de thérapie médicamenteuse. Le but est alors d’éviter une perte de poids sévère ou une perte de masse musculaire engendrant un retard, voire une suspension de traitement.
Certains patients appréhendent cette intervention. Que leur dites-vous dans ce cas ?
Il arrive que certains patients refusent cette intervention. Dans ce cas, il faut essayer de discuter avec eux. En leur expliquant notamment que c’est un dispositif plus confortable que la sonde naso-gastrique (qui peut irriter le nez) et moins contraignant et qui comporte moins de risques que la nutrition parentérale (par les veines). En effet, cette dernière nécessite la pose d’une voie centrale et le passage d’une infirmière à domicile deux fois par jour. La nutrition entérale offre une plus grande autonomie au patient. Il gère seul en branchant sa poche quand il le souhaite.
Pourquoi est-elle particulièrement utile aux patients touchés par un cancer de la tête et du cou ?
Parce que ces patients ont des troubles de la déglutition en pré (n’arrive pas à avaler) ou en post opératoire (certaines localisations comme la langue, entraînent des difficultés à avaler). Elle est également systématiquement proposée quand le patient aura un traitement de radio-chimiothérapie en prophylaxie, avant que les troubles n’apparaissent.
Existe-t-il des contre-indications ?
Les contre-indications à la pose de gastrostomie sont rares : ascite, trouble de la coagulation, infection de paroi, hypertension portale, particularités anatomiques.
Que se passe-t-il après la pose de la sonde ?
24 heures après l’intervention, l’infirmière du service vérifie le bon fonctionnement de la sonde de gastrostomie et débute la nutrition par celle-ci, en fonction des consignes laissées par la diététicienne ou le médecin. Si le patient supporte bien ce premier apport (pas de nausée, pas de régurgitation, ni de sensation de lourdeur au niveau de l’estomac), le médecin prescrira l’arrêt de la perfusion. La nutrition peut alors s’effectuer à un rythme de 3 à 4 fois par jour. L’infirmière du service expliquera alors comment bien utiliser la sonde.
Comment cela se passe à la maison ?
La texture de l’alimentation sera décidée après avis de la diététicienne. S’il n’y a pas de contre-indication, il est possible de s’alimenter par la bouche en complément de la sonde de gastrostomie. Un prestataire de service livrera à domicile les produits et le matériel, à la demande de la diététicienne ou de l’infirmière de coordination des soins externes (ordonnance et documents fournis directement). Le matériel qui sera livré correspond aux tubulures, sets de soins, poche d’alimentation et tout matériel pouvant correspondre à vos besoins (pompe, poche à eau…). Parmi ce matériel se trouve un set de remplacement transitoire qui est à garder et ne servira qu’en cas de perte de la sonde.
Le suivi de l’alimentation sera ensuite assuré par une diététicienne du prestataire qui restera en contact avec celle de l’établissement dans lequel la pose a été réalisée.
Pourra-t-on enlever la sonde ?
La gastrostomie n’est pas nécessairement définitive. Les patients gardent la sonde entre trois et six mois. Le retrait se fait en consultation par l’infirmière ou le médecin. L’orifice se referme dans les heures qui suivent.
Si la sonde de gastrostomie doit être gardée au-delà de six mois, elle sera changée de façon systématique en consultation. Le changement de sonde peut avoir lieu avant en cas de problème avec celle-ci : sonde bouchée, ballonnet percé… Dans tous les cas, il est important d’en parler avec votre médecin pour trouver une solution adaptée à vos besoins.
Propos recueillis par Céline Dufranc
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