Auriculothérapie

La femme qui murmurait à l’oreille de ses patient

INTERVIEW

Et si vous tendiez l’oreille ? Le Dr Chris­tine Pailler pra­tique l’auriculothérapie depuis 2013 à l’institut de can­cérolo­gie Gus­tave-Roussy. Une tech­nique qui n’a pas fini de faire par­ler d’elle…

En quoi consiste l’auriculothérapie ? 

Sché­ma­tique­ment, c’est une façon de « soign­er » avec les… oreilles ! Con­traire­ment à ce que l’on pour­rait penser, ce n’est pas de l’acupuncture car cela n’a pas été inven­té par les Chi­nois. Néan­moins, cela passe des points que l’on punc­ture. Le mécan­isme d’action n’est pas encore com­plète­ment élu­cidé. Ce qui est sûr, c’est que ce n’est ni ésotérique, ni mag­ique mais… très ancien. C’est le Dr Paul Nogi­er, qui l’a struc­turée et remise au goût du jour à la fin du XXème siè­cle. En obser­vant que l’oreille avait la forme d’un fœtus tête en bas, il a pu éla­bor­er des car­togra­phies, tra­vail­lées avec d’autres médecins, puis stan­dard­is­ées par l’OMS en 1990. Ces dernières sont encore étudiées et util­isées aujourd’hui : chaque région ou organe du corps cor­re­spond en effet à un point de l’oreille (plus d’une cen­taine de points réper­toriés). Naturelle­ment dotée de cap­teurs mécaniques et ther­miques, reliées à des fibres nerveuses spé­ci­fiques (C ou A delta), l’oreille est de par son orig­ine embry­ologique, directe­ment reliée au tronc cérébral. En décodé, le cerveau est comme un ordi­na­teur, l’oreille en est le clavier.

schema auriculotherapie

L’auriculothérapie est une tech­nique de réflexothérapie : la stim­u­la­tion périphérique du SN (sys­tème nerveux) induit une réponse d’équilibre du SN cen­tral, encore appelé homéostasie. Lorsque l’on pique un point de l’oreille, on envoie un mes­sage élec­trique au cerveau, ce dernier envoie des mes­sages de régu­la­tion via le sys­tème nerveux et on agit sur cer­tains maux. Au final, cela relève plus de de la neu­ro­mod­u­la­tion auric­u­laire que de la stimulation.

Quelles sont ses principales indications, particulièrement en ce qui concerne les cancers de la tête et du cou ? 

Elles sont nom­breuses. La stim­u­la­tion des points per­met d’interrompre la trans­mis­sion des mes­sages douloureux vers le cerveau, de faire sécréter des endor­phines par le cerveau (hor­mones du soulage­ment de la douleur et du bien-être proches de la mor­phine) ou de déclencher des réac­tions par un mécan­isme réflexe. L’auriculothérapie peut aus­si agir sur l’inflammation, notam­ment par l’intermédiaire du nerf vague et de l’axe microbiote-intestin-cerveau.

C’est donc une tech­nique de choix con­tre la douleur, la bouche sèche (appelée xéros­tomie), le tris­mus (quand la mâchoire est blo­quée et que l’on ne peut plus ouvrir la bouche), les neu­ropathies induites par les chimio­thérapies (sen­sa­tions désagréables de picote­ments et/ou brûlures douloureuses au niveau des mains et des pieds) ou les douleurs séquel­laires dans les zones irradiées. En chirurgie ORL, on l’utilise pour amélior­er la tolérance à l’anesthésie et à l’intervention puis après l’opération, pour atténuer les raideurs cica­tricielles. C’est égale­ment effi­cace pour amélior­er la qual­ité de vie, en réduisant le stress, les trou­bles du som­meil et les dos­es de médica­ments (antalgiques entre autres).

Comment se déroule une consultation ?

Le patient peut être adressé par son onco­logue ou son médecin trai­tant. Lors de la con­sul­ta­tion, on com­mence par l’écouter. Il nous explique ce qui le con­duit jusqu’à nous, ses symp­tômes, ses douleurs, les effets sec­ondaires rencontrés.

Après un diag­nos­tic de l’affection à traiter, le médecin auricu­lothérapeute réalise un exa­m­en clin­ique. Il en con­clu une hypothèse diag­nos­tic. L’intensité des symp­tômes est éval­uée par le patient sur une échelle numérique, puis inscrite sur un sché­ma qui per­me­t­tra au patient et au médecin de suiv­re l’amélioration (ou pas) après traite­ments. Ensuite le médecin éla­bore un pro­to­cole de traite­ment, com­por­tant le traite­ment en auricu­lothérapie, asso­cié aux autres traite­ments indiqués pour le patient.

Comment se passe le traitement ?

Après avoir iden­ti­fié les points et appliqué un anti­sep­tique sur l’oreille, ces derniers sont « traités » soit à l’aide de petits aimants (encore nom­més asp. : aigu­ille semi per­ma­nente) soit par un cry­op­unc­teur (avec du froid).

Comme il s’agit de neu­ro­mod­u­la­tion, l’effet est sou­vent immé­di­at, par exem­ple pour les douleurs. Le patient peut ensuite repar­tir, en con­ser­vant ses aigu­illes sur les oreilles qui tomberont seules quelques jours plus tard.

La pose des aigu­illes est rapi­de et qua­si indolore.

photo auriculotherapie 2
photo auriculotherapie

Combien de séances faut-il prévoir ?

Il faut compter générale­ment trois séances espacées d’un mois lorsque le symp­tôme est peu ancien. L’effet, qua­si immé­di­at, aug­mente au fil des séances.

A‑t-on prouvé l’efficacité de cette thérapie complémentaire, reconnue par l’OMS ?

Plusieurs études attes­tent que la stim­u­la­tion des pavil­lons de l’oreille a un impact au niveau cérébral.  Celle pub­liée en 2003 par le Dr David Hal­i­mi, neu­ro­phys­i­ol­o­giste à Gus­tave Roussy, s’appuie sur l’IRM fonc­tion­nelle cérébrale pour le démon­tr­er. Aujourd’hui, l’auriculothérapie est con­sid­érée comme une médecine com­plé­men­taire (et non comme une médecine alter­na­tive) : pour preuve, elle est enseignée dans cer­taines fac­ultés de médecine (Paris 11, Stras­bourg, Nantes) et est pra­tiquée dans cer­tains Cen­tres d’Evaluation et de Traite­ments de la Douleur hos­pi­tal­iers (Insti­tut Gus­tave Roussy, Hôpi­tal Bicêtre, Hôpi­tal Foch…).

Comment sait-on si c’est efficace, ou, en combien de temps en ressent-on les effets ?

C’est très rapi­de. On a à faire à un mécan­isme neu­rologique. Un peu comme si l’on appuyait sur un bou­ton « on/off », on peut sen­tir l’effet tout de suite et il va per­dur­er dans le temps. Seuls 5% des patients ne ressen­tent pas d’effets. Mais on peut leur pro­pos­er d’autres tech­niques pour amélior­er leur qual­ité de vie et lut­ter con­tre cer­tains effets indésir­ables des traitements.

Envie d’en savoir plus ? 

Retrou­vez le témoignage de Sylvie, tré­sorière de l’association

Pour trou­ver un médecin auricu­lothérapeute à prox­im­ité de son domi­cile : www.auriculo-academy.com

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