Je me suis un peu fâchée, je lui ai demandé de me regarder en face, de toucher cette petite boule qui arrivait dans le coin de l’œil.
Je m’appelle Christine et j’ai 60 ans.
J’ai vraiment décidé d’alerter suite à des difficultés de convergence qui étaient devenues assez handicapantes. Par exemple, quand j’étais fatiguée ou après un certain temps de conduite, c’était de plus en plus difficile pour moi de fixer une voiture devant moi, avec les yeux qui partaient dans le vague, des difficultés à supporter les lunettes, des chutes sans raison apparente. Ça a été vraiment progressif et évolutif.
À partir de janvier 2021, j’ai quand même vu mon médecin généraliste qui m’a envoyé prendre un rendez-vous chez mon ophtalmo. Pas de rendez-vous avant juin. Donc pour accélérer, j’ai pris rendez-vous dans un centre d’ophtalmologie. Vous savez, les centres où il y a beaucoup d’ophtalmos qui permettent un rendez-vous rapide. L’organisation est très efficace, mais les examens sont faits très rapidement par un orthoptiste et l’ophtalmo m’a très peu regardée. Tourné vers son ordinateur, il ne m’a pas du tout examinée. C’était aussi la période du Covid. Et pour lui, mes lunettes étaient adaptées, mais je ne les portais sans doute pas suffisamment et je devais faire de l’orthoptie. Durée du rendez-vous en tout et pour tout : dix minutes.
C’est grâce à l’orthoptiste qui était en échec, et n’arrivait pas à régler le sujet, que j’ai pu avoir un rendez-vous avec mon ophtalmo habituel qui, lui, n’était pas forcément plus attentif. Il a fallu qu’effectivement je lui dise : “Mais venez me regarder, venez toucher.” Et effectivement, il y avait une toute petite boule au coin de l’œil, là, qui permettait de voir qu’il y avait peut être quelque chose d’anormal. Et là, il m’a dit “Ah oui, peut être, on va vous envoyer faire une IRM”.
Et c’est à partir de là que, en juillet 2021, donc six mois après mes premières consultations, qu’on a vu qu’il y avait une tumeur de, déjà, 18 millimètres.
Alors après, tout s’est enchaîné, le temps d’avoir des rendez-vous à Bordeaux, le temps des examens, qui étaient un peu spécifiques, il s’est passé un an avant que finalement, je sois opérée.
La tumeur semblait toujours bénigne. Le chirurgien était confiant.
Huit jours après, les résultats sont tombés. Il s’agissait d’un carcinome adénoïde kystique, un CAK de son petit nom, de la glande lacrymale, de l’œil gauche. C’est un cancer rare dans les cancers rares.
Après passage en réunion de concertation pluridisciplinaire, il m’a été proposé une exentération élargie, c’est-à-dire qu’on enlève l’œil, l’os temporal, les nerfs sensitifs, de façon à me donner toutes les chances de me remettre de ce cancer.