Ciel mon Serment : un théâtre forum pour former les soignants aux difficultés de communication de leurs patients

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Le prochain con­grès de la Société Française de Radio­thérapie Oncologique (SFRO), qui se tien­dra du 17 au 19 sep­tem­bre 2025 à Bor­deaux, accueillera une ses­sion au for­mat quelque peu inhab­ituel. Sur l’estrade, se tien­dront non pas des soignants, mais des comé­di­ens. Ce théâtre forum — auquel Coras­so a con­tribué avec cœur et fer­veur — est le fruit d’une col­lab­o­ra­tion mul­ti­par­tite. Avec un objec­tif com­mun : amélior­er la for­ma­tion des pro­fes­sion­nels de san­té au tra­vers d’expériences réelles, vécues par des patients.

ciel mon serment

Assis dans l’amphithéâtre, les pro­fes­sion­nels de san­té ne seront pas là seule­ment pour écouter. Ils seront invités à par­ticiper. « Et vous, auriez-vous fait autrement ? » « Est-ce que quelque chose vous dérange dans ce que vous venez de voir et d’entendre ? » « Com­ment serait-il pos­si­ble, selon vous, de faire mieux ? » Jeu­di 18 sep­tem­bre à 16 heures, l’une des salles de con­férence du Palais des Con­grès de Bor­deaux devien­dra le théâtre d’une représen­ta­tion par­tic­i­pa­tive hors du com­mun. Le pro­gramme du con­grès de la Société Française de Radio­thérapie Oncologique inclut cette année un théâtre forum, élaboré main dans la main par les asso­ci­a­tions Ciel, Mon Ser­ment (qui forme les soignants à la com­mu­ni­ca­tion médi­cale à tra­vers les arts) et Coras­so.

Un théâtre forum, pour une séance de formation collaborative 

« Nous serons cinq acteurs pro­fes­sion­nels, mem­bres de Ciel, Mon Ser­ment, qui jouerons deux scènes illus­trant des échanges entre un médecin et son patient. Des scènes inspirées de sit­u­a­tions réelles, des­tinées à inter­roger, à soulever des points de dif­fi­culté, à inspir­er une réflex­ion. Le tout sans jamais être accusa­teur, cet aspect est très impor­tant », détaille Jeanne Gogny, comé­di­enne et direc­trice d’acteurs. Présen­tées une pre­mière fois dans leur inté­gral­ité, ces scènes seront ensuite rejouées et inter­rompues par moments, pour laiss­er inter­venir les soignants présents dans l’assistance. Le for­mat par­tic­i­patif du théâtre forum est appré­cié depuis fort longtemps par le grand pub­lic, lors de représen­ta­tions pure­ment artis­tiques. Adapter ce for­mat à la for­ma­tion des soignants est un pari plus récent, encore peu employé, mais qui ren­ferme un grand poten­tiel pédagogique.

« Nous avons choisi pour thé­ma­tique de ces scènes la dyscom­mu­ni­ca­tion, c’est-à-dire les prob­lèmes de com­mu­ni­ca­tion suite à un can­cer ORL », détaille le Pr Sébastien Thureau. Un thème cher à l’oncologue-radiothérapeute du cen­tre Hen­ri Bec­quer­el de Rouen, égale­ment prési­dent de Ciel, Mon Ser­ment : « Je soigne ces patients tous les jours et ils sont par­ti­c­ulière­ment touchés par les dif­fi­cultés à com­mu­ni­quer, qui peu­vent être très var­iées. »  Et pour illus­tr­er des dif­fi­cultés réelles et éprou­vées, rien de mieux que de s’adresser à des vrais patients. « C’est pourquoi j’ai tout de suite souhaité impli­quer Coras­so dans ce pro­jet », pour­suit le Pr Thureau. 

» Pour mieux com­pren­dre cer­tains trou­bles de la com­mu­ni­ca­tion, décou­vrez notre arti­cle sur la dys­pho­nie post can­cer tête et cou

Porter la voix des patients dyscommunicants

De la genèse de ce beau pro­jet à sa con­créti­sa­tion à venir mi-sep­tem­bre, plusieurs étapes ont prou­vé l’intérêt d’une col­lab­o­ra­tion étroite entre médecins et patients. Avec comme point cul­mi­nant une journée spé­ciale, une ren­con­tre avant tout humaine, dans les locaux de l’hôpital du Mans. Mars 2025. Autour de la table : neuf per­son­nes, de l’écoute, de la con­fi­ance. Deux comé­di­ennes, trois médecins, qua­tre patientes, toutes mem­bres actives de Coras­so, étaient venus partager des exem­ples con­crets de dif­fi­cultés de com­mu­ni­ca­tion ren­con­trées au fil des par­cours de soin. 

Vir­ginie, diag­nos­tiquée d’un can­cer du tiers supérieur de l’œsophage en 2021 ayant entraîné une pharyn­go-laryn­gec­tomie totale, témoigne de sa par­tic­i­pa­tion. « La journée de pré­pa­ra­tion a été très ent­hou­si­as­mante et enrichissante car nous avons tra­vail­lé main dans la main, sans blouse entre nous pour empêch­er la ren­con­tre de nos vul­néra­bil­ités. J’ai appré­cié la flu­id­ité et la richesse de nos échanges qui ont notam­ment con­tribué à répar­er pour moi une expéri­ence assez dif­fi­cile et vio­lente dans un cen­tre hos­pi­tal­ier qui m’a traité comme un objet et un corps, plutôt que comme une per­son­ne et un sujet en soin. J’ai trou­vé intéres­sants ce partage hor­i­zon­tal, de per­son­ne à per­son­ne, la sim­plic­ité et la flu­id­ité des échanges, com­ment cha­cun de nous s’est mis à nu pour con­tribuer à faire avancer, par le théâtre forum, une com­mu­ni­ca­tion bien­veil­lante soignant-soigné, respectueuse de chacun. »

« La journée de pré­pa­ra­tion a été très ent­hou­si­as­mante et enrichissante car nous avons tra­vail­lé main dans la main,
sans blouse entre nous pour empêch­er la ren­con­tre de nos vulnérabilités. »

Une impres­sion con­fir­mée par Car­o­line, traitée pour un can­cer de la langue décou­vert en 2016 : « Ce fut une journée de pré­pa­ra­tion très intense, riche en échanges et en bien­veil­lance. Je souhaite à tous les patients de pou­voir vivre une telle expéri­ence, c’est assez rare pour le soulign­er. Dans ce type de ren­con­tre, les soignants sont sans blouse blanche, sur un pied d’é­gal­ité et on s’aperçoit qu’ils ont aus­si des doutes. Ils se posent des ques­tions et sont intéressés d’en­ten­dre notre expéri­ence patient afin d’amélior­er la prise en soin. »

Tous ces partages ont con­sti­tué la base de tra­vail pour la rédac­tion des scènes du théâtre forum, dont le tra­vail incombe désor­mais à Aurélie et Jeanne de Ciel, Mon Ser­ment, qui ont orchestré cette journée de ren­con­tre. « Nous avions d’abord organ­isé des visio­con­férences, pour met­tre un vis­age sur chaque per­son­ne avec qui nous échan­gions préal­able­ment par mail. Nous avions ensuite envoyé un ques­tion­naire à cha­cune des patientes, dans lequel elles pou­vaient nous faire part de leur vécu, d’épisodes qui avaient été dif­fi­ciles à vivre pen­dant leur par­cours de soin », explique Aurélie Ede­line, met­teuse en scène et comé­di­enne. 

« La ren­con­tre physique a vrai­ment apporté un plus, ces femmes, ces mal­adies, ces par­cours étaient incar­nés », pour­suit Jeanne Gogny. « Cela nous a per­mis, pour écrire les scé­nar­ios des inter­ac­tions soignant-soigné, de nous appuy­er sur des sit­u­a­tions qui n’ont rien d’hypothétique. » Avec pour résul­tat, un impact cer­tain sur les pro­fes­sion­nels de san­té qui assis­teront aux représentations.

« Dans ce type de ren­con­tre, les soignants sont (…) sur un pied d’é­gal­ité et on s’aperçoit qu’ils ont aus­si des doutes. Ils se posent des ques­tions et sont intéressés d’en­ten­dre notre expéri­ence patient afin d’amélior­er la prise en soin. »

Des humains de part et d’autre

Dans le but de représen­ter l’autre côté des inter­ac­tions lors des con­sul­ta­tions, le Pr Sébastien Thureau avait con­vié les Drs Ruffi­er et Rous­sel à par­ticiper à l’élaboration du théâtre forum. « Nous avons pu évo­quer des événe­ments qui nous ont posé prob­lème d’un point de vue de la com­mu­ni­ca­tion, que nous avons dif­fi­cile­ment vécus. Évo­quer le ressen­ti à la fois des patients et des médecins est quelque chose de rare, c’est une excel­lente idée. Car nous avons, nous aus­si, nos émo­tions, notre pro­pre expéri­ence qui joue dans l’interaction avec nos malades », con­fie le Dr Aman­dine Ruffi­er, onco­logue-radio­thérapeute au Mans. « Nous avons par­fois la per­cep­tion que nous auri­ons pu mieux faire dans telle ou telle sit­u­a­tion. Enten­dre des patients évo­quer des moments déli­cats avec leurs soignants nous a aus­si per­mis de réalis­er que nous pou­vons être blessants, infan­til­isants, sans que cela soit inten­tion­nel et sans nous en ren­dre compte sur le moment. » 

Le Dr Lise-Marie Rous­sel, spé­cial­isée en chirurgie ORL et cer­vi­co-faciale au cen­tre Hen­ri Bec­quer­el de Rouen, acqui­esce : « Je suis très impa­tiente de voir ce que vont don­ner ces échanges con­crète­ment, traduits en scé­nar­ios, lors de leur présen­ta­tion au con­grès. Il est cer­tain que, en tant que médecins de spé­cial­ités très tech­niques, nous sommes par­fois inscrits dans des automa­tismes de com­mu­ni­ca­tion, à la fois pour nous pro­téger et pour sim­pli­fi­er les choses. Il peut donc nous arriv­er de mal appréhen­der cer­taines sit­u­a­tions. Par­ticiper à la con­struc­tion de ce théâtre forum nous a rap­pelé l’im­por­tance de pren­dre du temps pour réfléchir à nos pra­tiques et pour voir com­ment les amélior­er. »

« Enten­dre des patients évo­quer des moments déli­cats avec leurs soignants nous a aus­si per­mis de réalis­er que nous pou­vons être blessants, infantilisants. »

Voici qui résume par­faite­ment la voca­tion de ce théâtre forum, dont le finance­ment a été ren­du pos­si­ble grâce au Col­lège Nation­al des Enseignants de Can­cérolo­gie (CNEC), la Société Française de Radio­thérapie Oncologique (SFRO), la Ligue con­tre le can­cer 76, le Groupe d’On­colo­gie Radio­thérapie Tête Et Cou (GORTEC) et le Groupe­ment des Entre­pris­es Français­es dans la LUtte con­tre le Can­cer (GEFLUC) Nor­mandie. Après le con­grès de la SFRO mi-sep­tem­bre, au moins trois autres ses­sions sont déjà prévues pour présen­ter cette for­ma­tion inter­ac­tive sur les dif­fi­cultés à com­mu­ni­quer en can­cérolo­gie ORL et élargir, autant que pos­si­ble, le pub­lic médi­cal touché.

Pro­pos recueil­lis par Vio­laine Badie

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