23 janvier 2020 : une pierre blanche pour les Corassiens

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Ce n’est qu’au bout de quelques années où, mal­gré un envi­ron­nement médi­cal, famil­ial, ami­cal et pro­fes­sion­nel qui m’au­ra été d’un très effi­cace récon­fort, je me sen­tais bien seul en tant que malade, que j’ai enten­du par­ler de l’as­so­ci­a­tion CORas­so. J’y ai aus­sitôt adhéré, et me suis inscrit sur le groupe d’échange Face­book. En par­ti­c­uli­er grâce à Car­o­line, j’y ai glané quelques pré­cieuses infor­ma­tions pratiques.

Mais surtout, même sans y être vrai­ment act­if, j’y ai ressen­ti la force du groupe. Pour l’avoir déjà vécu, dans de toutes autres cir­con­stances, je sais à quel point le partage, l’en­traide et la sol­i­dar­ité sont fon­da­men­taux quand la vie nous con­fronte à de graves problèmes.

Ce que j’avais expéri­men­té alors, et que j’ai immé­di­ate­ment retrou­vé avec CORas­so, c’est bien sûr le sou­tien que l’on reçoit. Mais, plus encore peut-être, ce que l’on peut pro­pos­er comme aide, si mod­este soit-elle. Par des échanges privés, avec des gens que je n’avais jamais ren­con­trés en vrai, je me suis sen­ti utile. Dis­ons-le car­ré­ment : je n’avais pas souf­fert tout à fait pour rien.

Pour autant, rien ne vaut le vrai con­tact humain ! C’est pourquoi, quand j’ai appris qu’une grande ren­con­tre était organ­isée, le 23 jan­vi­er dernier, que c’é­tait près de chez moi, et surtout dans l’hôpi­tal où j’ai été soigné et où je suis suivi, je n’ai pas hésité.

À vrai dire, je n’avais pas bien com­pris l’organisation de cette journée. Dans tous les doc­u­ments, il était ques­tion d’un accueil à 17h30, de divers­es tables ron­des à par­tir de 18h, et d’un buf­fet dina­toire à 20h30. Dans d’autres doc­u­ments, il était aus­si ques­tion d’un café-ren­con­tre à 14h30. En fait, au début de l’après-midi c’était pour les adhérents, et après pour tout le monde.

J’y suis allé pour 14h30, dans l’idée de ren­con­tr­er d’autres adhérents, mais en pen­sant que je ne resterais pas jusqu’à la fin. J’avais tout de même fait en sorte de n’avoir rien d’autre à faire de la journée, au cas où je veuille rester plus longtemps. Et j’ai bien fait, puisque je ne suis par­ti qu’après 22h !

Quand je suis arrivé, c’était l’ébullition de la pré­pa­ra­tion des tables ron­des et de la soirée. J’ai fait con­nais­sance avec les mem­bres les plus act­ifs de l’association, que je n’avais jamais ren­con­trés, même si j’avais eu quelques échanges sur Face­book, et même si je con­nais­sais cer­taines têtes pour les avoir vues sur les affich­es de la cam­pagne « Quoi ma gueule ? ». J’ai trou­vé des gens plus ou moins abimés physique­ment, mais moins que sur les affich­es (ce qui prou­vait une évo­lu­tion pos­i­tive), et surtout joyeux, drôles et chaleureux.

Au milieu de quelques échanges per­son­nels, où immé­di­ate­ment l’intime prend toute sa place car nous avons une his­toire com­mune qui nous a touchés de très, très près, il m’a été pro­posé de par­ticiper à un « haka » qui serait présen­té lors de la soirée. Nous avons donc pré­paré cette sorte de danse rit­uelle, avec des paroles bien envoyées sur le can­cer devant lequel nous ne bais­sons pas les bras (surtout que ces bras sont encore ce qui fonc­tionne le mieux chez nous, malades ORL !).

Était présente, pour cet après-midi, une socio-esthéti­ci­enne, qui pro­po­sait ses ser­vices. Depuis le temps que j’avais envie d’une manu­cure, l’occasion était par­faite ! S’abandonner ain­si aux bons soins de quelqu’un, qui pour une fois n’a ni panse­ment à refaire, ni per­fu­sion à installer, ni drain à sur­veiller (liste non exhaus­tive), voilà qui fait du bien…

Puis, c’était le temps des tables ron­des. Dif­fi­cile de dire ce qui l’a emporté entre l’intérêt et l’émotion… C’était en effet très intéres­sant… et tou­jours très émou­vant. En tout cas quand on est con­cerné d’aussi près. Les témoignages de malades, bien sûr : on revit tant de choses, qui lais­sent tant de sou­venirs, telle­ment con­trastés. Les témoignages d’aidants : pour beau­coup, nous avons été si mer­veilleuse­ment entourés. Et les témoignages des pro­fes­sion­nels, telle­ment dévoués, telle­ment com­pé­tents. Par­mi eux, le Doc­teur Elis­a­beth Sauvaget, chef de ser­vice de chirurgie ORL de l’hôpital Saint-Joseph, qui a été de toutes mes opéra­tions, et en qui j’ai une con­fi­ance absolue… ce qui est d’un immense con­fort quand on est con­fron­té à d’aussi sérieux prob­lèmes de santé.

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Dans la salle, j’ai retrou­vé, avec un immense plaisir, Clau­dine, l’infirmière « en chef » (qui n’en porte peut-être pas le titre admin­is­tratif, je n’en sais rien, mais qui en a assuré­ment l’autorité) du ser­vice ORL de l’hôpital. J’ai passé pas mal de temps dans ce ser­vice, à dif­férentes occa­sions, et j’ai une recon­nais­sance infinie envers tout le per­son­nel soignant, telle­ment atten­tif, telle­ment humain… C’est un tel récon­fort quand on est dans une telle sit­u­a­tion de faib­lesse, de détresse même, par­fois. Mais qu’on ne s’y trompe pas : éton­nam­ment, je garde d’excellents sou­venirs de tous ces séjours. Et c’est en très grande par­tie pré­cisé­ment grâce à Clau­dine et à ses collègues.

Et enfin, le buf­fet. Oui, mais… Dans la liste des domaines qui ont vu notre vie bas­culer avec ce can­cer ORL, l’alimentation arrive en bonne place. Plus ou moins pour cha­cun, bien sûr, mais le plus sou­vent, plutôt plus que moins. Et pour moi, c’est net­te­ment là où je me sens le plus hand­i­capé, et ce qui me pèse le plus. Les organ­isa­teurs ne pou­vaient pas ne pas y avoir pen­sé, et heureuse­ment cha­cun pou­vait trou­ver au moins quelque chose qui lui convienne. 

Nous avons présen­té notre « haka », qui a beau­coup fait rire. Et encore beau­coup d’échanges per­son­nels. En ce qui me con­cerne, out­re les adhérents de CORas­so, avec Clau­dine, l’infirmière, qui était avec deux nou­velles venues du ser­vice ORL, sur des postes qui n’existaient pas quand j’y avais été hos­pi­tal­isé : Yas­mine, ortho­phon­iste, et Marie, psy­cho­logue. Savoir que le ser­vice ORL s’est enrichi de ces deux postes oh com­bi­en pré­cieux, attribuées à des per­son­nes aus­si sym­pa­thiques, don­nerait presque envie d’y être à nou­veau hospitalisé !

Un immense mer­ci à CORas­so d’exister d’abord, et ensuite d’avoir organ­isé cette mag­nifique journée. Mer­ci à Car­o­line, Sab­ri­na, Stéphanie, Michel et Sylvie, que je cite parce que j’ai pu échang­er avec eux ; mais je sais qu’ils ne sont pas seuls, et qu’il y en a encore d’autres, tout aus­si for­mi­da­bles, qui ont souf­fert, et qui ont su, par leur amour de la vie (qu’ils se sont peut-être, comme moi, décou­vert à cette occa­sion), trans­former cette souf­france en ce telle­ment généreux et superbe don aux autres.

Pierre

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