Activité physique adaptée (APA)

« L’APA permet d’augmenter l’autonomie et la qualité de vie des patients »

Triath­lète et man­ag­er de struc­tures sportives pen­dant 15 ans, touchée à 35 ans par un can­cer gyné­cologique lui lais­sant des séquelles de lym­phœdème à la jambe, Eléonore Piot de Vil­lars a l’art de rebondir. Désor­mais prati­ci­enne en Edu­ca­tion thérapeu­tique, patiente parte­naire à l’Institut Curie et référente de l’association IMAGYN, la prési­dente de Lympho’sport nous explique l’importance de l’activité physique adap­tée dans le par­cours de soins.

Eléonore - APA

Qu’est-ce que l’APA ? 

Avant de par­ler d’activité physique adap­tée, il faut par­ler d’activité physique : il s’agit de tous les moments où nous ne sommes pas séden­taires (par exem­ple assis à regarder la télévi­sion, sans rien faire) et oū nous mobil­isons notre corps, via des con­trac­tions mus­cu­laires pour accom­plir des actions du quo­ti­di­en : ce sont à la fois les activ­ités sportives (jouer au ten­nis, nag­er, courir, etc.) les activ­ités de déplace­ment (faire du vélo, marcher, mon­ter un escalier, etc), les activ­ités de loisirs (jar­diner, bricol­er…) ou du quo­ti­di­en (faire le ménage, faire les courses…).

De leur côté, les activ­ités physiques adap­tées (APA) regroupent l’ensemble des activ­ités physiques que l’on va adapter aux risques, aux lim­i­ta­tions fonc­tion­nelles et aux capac­ités des per­son­nes atteintes de mal­adie chronique et dans notre cas, de can­cer. L’APA va per­me­t­tre d’augmenter l’autonomie et la qual­ité de vie des patients. Il est con­seil­lé de démar­rer les cours d’APA le plus tôt pos­si­ble, idéale­ment dès l’annonce du diag­nos­tic en préha­bil­i­ta­tion, avant les traite­ments et après la chirurgie, dès le feu vert de l’oncologue ou du chirurgien.

Quels sont les principaux objectifs de l’activité physique adapté après un cancer ?

D’abord, repren­dre de la masse mus­cu­laire car un corps qui se démus­cle, c’est un corps qui va se fatiguer beau­coup plus. L’APA per­met de lut­ter con­tre le décon­di­tion­nement physique pour mieux tolér­er les traite­ments. Si j’ai per­du trop de mus­cles au niveau des jambes, j’aurais du mal à pren­dre mon train, ou à mon­ter mes escaliers pour me ren­dre à ma prochaine séance de radio­thérapie. Au final, je récupér­erai moins bien.

Ensuite, mieux gér­er sa fatigue dûe au traite­ment. C’est la seule thérapeu­tique non médica­menteuse validée en oncolo­gie pour lut­ter con­tre la fatigue1. Elle réduit de 36 % en moyenne la fatigue induite par les traite­ments. Dans mon cas, je suis sou­vent fatiguée à cause de la douleur et des effets sec­ondaires des médica­ments. Quand je pra­tique la marche nordique, j’ai beau­coup plus de pêche pour la fin de ma journée.  

Et pour finir, ça booste le moral, en jouant sur la pro­duc­tion d’hormones. Cela améliore la con­fi­ance en soi, et le regard que l’on porte sur son corps, mal­traité par les traite­ments, qui rede­vient un équipier !

Concrètement, si l’on a un cancer tête et cou, que peut apporter l’APA ?

L’un des objec­tifs sera de toni­fi­er les mus­cles du cou, les trapèzes, qui per­me­t­tent une meilleure tenue de la tête, la cein­ture scapu­laire qui com­mande l’épaule, mais aus­si les mus­cles dor­saux et le gainage des abdom­inaux. Ensuite, on peut tra­vailler sur l’ouverture de la cage tho­racique et des épaules, ce qui per­me­t­tra au patient de mieux respir­er et de mieux ven­til­er. Comme pour tous les can­cers, si l’on a une fonte mus­cu­laire, on va essay­er de repren­dre de la masse mus­cu­laire au niveau des jambes et des bras. Cela peut per­me­t­tre aus­si de repren­dre du poids et de garder une cer­taine autonomie.

Comment en bénéficier ? 

Les onco­logues et les médecins général­istes peu­vent ori­en­ter les patients vers des pro­fes­sion­nels de l’activité physique, comme par exem­ple la CAMI sport et can­cer, qui m’a for­mée. Ils doivent délivr­er une pre­scrip­tion de non con­tre-indi­ca­tion à l’activité physique dans le cadre traite­ment d’un cancer. 

De nom­breux cen­tres de can­cérolo­gie dis­posent désor­mais de ser­vices de soins de sup­port, où l’on pro­pose des séances de sport adap­té. Il existe aus­si des struc­tures de Sport San­té dans de nom­breuses villes avec des enseignants APA. Autre piste, les comités de la Ligue con­tre le can­cer pro­posent des séances dans la plu­part des départe­ments. Par ailleurs, n’oublions pas que les pre­miers spé­cial­istes de l’activité physique adap­tés sont les kinés ! Con­nais­sant mieux que quiconque le corps de leurs patients, ils sont les pre­miers habil­ités à con­cevoir des séances adap­tées, pour regag­n­er en masse mus­cu­laire, tra­vailler l’équilibre et la sou­p­lesse. Je pense notam­ment à la for­mi­da­ble Joce­lyne Rol­land qui a créé des séances de Rose Pilate et d’avirose. Quelle que soit l’APA envis­agée, un bilan devra être réal­isé au préal­able afin de voir où en est le patient, quelle a été son traite­ment, quel est son niveau de con­di­tion physique, ses lim­i­ta­tions fonc­tion­nelles, ce qu’il fait déjà peut-être avec un kiné… C’est un véri­ta­ble tra­vail d’équipe.

Et si l’on n’a pas de structure près de chez soi ? 

Si l’on n’a pas de struc­ture près de chez soi, ou que l’on n’a pas très envie de par­ticiper à un cours col­lec­tif, il faut essay­er de trou­ver une activ­ité que l’on aime : marcher, mon­ter un escalier plusieurs fois par jour, s’acheter un petit step­per ou un vélo d’appartement. Si vous aimez danser, met­tez de la musique, ren­trez le ven­tre et faites des pas chas­sés : vous fer­ez tra­vailler les mus­cles des cuiss­es et votre souffle. 

L’idée, c’est de com­mencer petit pour aller loin. De ne pas se met­tre de bar­rières. Ni vers le haut, ni vers le bas. L’objectif étant de s’oxygéner et de pren­dre soin de son corps en réal­isant une activ­ité 5 fois 30 min­utes par semaine.  Dernier con­seil, si vous allez dehors, n’oubliez pas d’appliquer une crème solaire SPF 50 pour vous pro­téger des effets nocifs du soleil.

“L’idée c’est de com­mencer petit pour aller loin !”

L’APA, c’est gratuit ? 

Quand les séances sont faites au sein d’un étab­lisse­ment de san­té, elles sont la plu­part du temps gra­tu­ites ain­si que dans les struc­tures de Sport San­té. En revanche, en dehors de ces struc­tures, elles ne sont pas encore pris­es en charge par l’assurance mal­adie, ni par les mutuelles, à part dans quelques villes et départe­ments français « test ». Mais c’est en cours, avec le déploiement du panier de soins de sup­port mis en place par l’INCA2

Parlez-nous de votre association, LYMPHO’SPORT

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Quand je me suis retrou­vée avec mes séquelles de lym­phœdème qui pro­gres­saient de plus en plus au niveau de la jambe et du petit bassin après un can­cer gyné­cologique, j’ai con­staté que de fauss­es croy­ances cir­cu­laient. On dis­ait par exem­ple qu’il ne fal­lait surtout pas bouger avec ce type de séquelle ! Ayant expéri­men­té les bien­faits du mou­ve­ment sur le lym­phœdème, je savais bien que c’était faux. En 2015, j’ai donc pro­posé des cours de marche nordique adap­tée, « marche nordi’Cancer », à des patients atteints de can­cer et de lym­phœdème, en les faisant tra­vailler sur des objec­tifs spé­ci­fiques. Aujourd’hui, l’association inter­vient exclu­sive­ment dans des pro­grammes d’éducation thérapeu­tique, dans des ate­liers Bouger, notam­ment pour lut­ter con­tre la douleur. 

Pro­pos recueil­lis par Céline DUFRANC

1Frieden­re­ich ; Phys­i­cal activ­i­ty and can­cer out­comes ; Clin­i­cal Can­cer Research. 2016. Schmid et al; Asso­ci­a­tion between phys­i­cal activ­i­ty and mor­tal­i­ty among breast can­cer and col­orec­tal can­cer sur­vivors : a sys­tem­at­ic review and meta-analy­sis ; Annals of Oncol­o­gy. 2014.

2https://www.e‑cancer.fr/Professionnels-de-sante/Parcours-de-soins-des-patients/Soins-de-support-dans-le-parcours-de-soins

RESSOURCES :

www.lymphosport.com
www.imagyn.org
CAMI : sportetcancer.com

 INFO + : qui sont les pro­fes­sion­nels de l’APA ?

  • soit un masseur-kinésithérapeute, un ergothérapeute ou un psy­chomotricien, qui sont des pro­fes­sion­nels de santé ; 
  • soit un enseignant APA qui n’est pas un pro­fes­sion­nel de san­té, mais qui est tit­u­laire au min­i­mum d’une licence men­tion STAPS « activ­ité physique adap­tée et santé ». 

En savoir plus sur l’A­PA avec l’INSERM

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