Soigner un cancer de la tête et du cou (ORL) peut nécessiter l’ablation d’une partie du visage. Il peut s’agir du nez, d’un œil, d’une oreille… Étape importante dans le parcours d’un patient concerné par un tel traitement, en vue de préparer l’après : la rencontre avec un épithésiste. Lorsque le moment de façonner un nouveau visage est venu, les épithésistes travaillent avec la plus grande précision possible pour une reconstruction harmonieuse. Comment les prothèses sont-elles fabriquées ? Comment tiennent-elles ? Se retirent-elles ? Sont-elles prises en charge par la Sécurité sociale ? Laurent Afflatet, prothésiste maxillo facial et épithésiste à Marseille répond à toutes nos questions.
Lorsque vous rencontrez un patient en vue de préparer son épithèse, comment se passe-t-il ? Vous échangez beaucoup sur ses inquiétudes, ses angoisses, ses attentes ?
Pour un patient, ce n’est pas évident de se dire qu’on va peut-être lui enlever une partie du nez, de savoir à quoi il va ressembler. En amont, il y a en effet beaucoup de psychologie, de sensibilité. Il y a des vies de couple, beaucoup de choses qui tournent autour de ça et du regard de l’autre. La vie à deux et la vie en dehors aussi, qui est encore une autre problématique. D’où l’importance de cette prise en charge précoce, d’écouter la sensibilité des uns et des autres, pour savoir à quel moment on peut montrer telle ou telle image, par exemple. Nous avons des photos de patients réalisées avant, pendant et après la chirurgie. Nous pouvons montrer des étapes, mais pour certains patients ce n’est pas le bon moment.
Il est important de savoir à quel niveau psychologique les patients en sont pour essayer d’apporter à chaque étape l’accompagnement, les photos et les supports disponibles. Ils ont besoin aussi de toucher une prothèse.
Nous avons des échantillons de silicone et des prothèses factices, pour qu’ils puissent réaliser à quoi ressemble une structure de nez, ou d’oreille, ou autre.
Nous expliquons comment fonctionnent les couleurs et surtout comment les prothèses tiennent.
Justement, comment tiennent-elles ? Se retirent-elles quotidiennement ?
Il y a des prothèses qui tiennent par de la colle médicale, d’autres que l’on fixe sur des lunettes – pour des patients porteurs de lunettes. Certaines prothèses peuvent aussi tenir grâce à des implants sur lesquels elles sont stabilisées par des aimants ou des cavaliers (barres).
Les prothèses se retirent le soir pour laisser la peau respirer et pour pouvoir les nettoyer suivant un protocole remis au patient.
Comment fabriquez-vous les prothèses ?
Les prothèses peuvent être réalisées selon plusieurs méthodes.
C’est encore un travail d’artisanat au cas par cas et il n’y a rien de totalement générique ou industriel.
La 3D nous permet des avancées mais c’est toujours du sur-mesure adapté à la morphologie et couleur de peau du patient
Une épithèse n’est pas faite avec des « matériaux caméléon ».
La Sécurité sociale prend en charge les prothèses tous les deux ans et demi. Il faut donc proposer une prothèse qui tienne dans le temps et qui s’adapte aux quatre saisons pour supporter différentes contraintes telles que la transpiration, la chaleur, etc. L’épithésiste doit aussi anticiper le fait d’en faire plusieurs autres, car une seule prothèse, souvent, ne suffit pas pour traverser les deux ans et demi.
En moyenne, quelle est la durée de vie d’une prothèse ?
Cela dépend de l’environnement dans lequel elle est portée et de la façon de l’entretenir. Certaines peuvent durer deux ans et demi sans problème, d’autres s’abîment au bout de deux mois. Ce n’est pas pour autant qu’un renouvellement sera facturé. Il faut juste l’anticiper par rapport à l’environnement du patient, à ses conditions de travail, etc.
Est-ce que le patient a une vie sédentaire ou active ? Est-ce qu’il met un casque de moto ou autre ? Plusieurs paramètres contribuent à la dégradation de la prothèse. Et les prothèses collées s’abîment plus facilement au niveau des bords (qui se doivent d’être très fins), à force d’être collées et décollées.
Quel est le coût d’une épithèse ? Est-elle prise en charge par la Sécurité sociale ?
C’est une vaste question.
Les épithèses font partie de la famille des Grands Appareillages.
Les professionnels réalisent un devis accompagné d’une demande d’entente préalable et de la prescription des chirurgiens afin que le service médical puisse donner son accord pour la prise en charge de l’épithèse.
Certains tarifs peuvent varier en fonction du temps passé sur la prothèse, s’il y a un modèle 3D derrière, s’il y a plusieurs prothèses à réaliser, etc.
S’il y a un événement intercurrent comme une nouvelle chirurgie, le patient pourra bénéficier d’une nouvelle prothèse avec entente préalable.
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