Carine sent de nouveau l’odeur du café. Celle des herbes de son jardin. Une sensation qui avait disparu depuis qu’elle a été opérée d’un cancer des fosses nasales. Après 10 ans de souffrance et d’isolement, cette mère de famille commence à revivre. Elle raconte.

« En 2013, on m’a diagnostiqué un cancer des fosses nasales. La chimiothérapie et la radiothérapie ont détruit une large partie de mon nez et de mon palais. En moins de cinq mois, j’étais quasiment défigurée. On a pu reconstruire une partie de mon palais mais cela n’a pas marché pour le nez. Après plusieurs échecs de reconstruction nasale par greffe de lambeaux de peau, j’ai essayé de porter une prothèse faciale (épithèse) mais je ne la supportais pas. Je ne sentais quasiment plus rien… C’était vraiment très dur. Le pire, c’était le regard des gens, tellement blessant. À tel point que je ne sortais plus. Je m’isolais de plus en plus.
Après avoir été suivie dans le Tarn, j’ai été prise en charge par l’équipe du Pr Dupret-Bories à Toulouse. Dès 2020, elle m’a parlé de ses recherches. Quand elle m’a proposé cette greffe, j’ai tout de suite dit « oui ». Après ce que j’avais vécu, je n’avais rien à perdre. J’avais une totale confiance en elle. Elle savait ce qu’elle faisait. Elle m’a bien mise en garde contre tous les risques possibles mais rien ne m’aurait arrêtée.
Lorsque l’on m’a installé l’implant dans le bras en juillet, j’étais ravie de cette « trouvaille » ! Je pouvais surveiller ce qui se passait. Rapidement, j’ai vu que le matériau incroyable qui le composait s’amalgamait parfaitement avec les tissus. Il n’y a pas eu de réaction négative, de rougeur, d’infection ni quoi que ce soit d’autre. Quand on a défait le pansement de mon bras, c’était incroyable : ça avait la forme d’un nez ! Résultat, deux mois après, Le Pr Dupret-Bories et le Dr Vairel ont pu me greffer ce nez en 3D sur le visage. L’intervention a duré 8 heures. Ensuite, je suis restée quelques temps aux soins intensifs. Je ne me suis pas vue tout de suite. Au début, j’étais un peu dans le brouillard… Mais quand j’ai découvert mon nez, quelle émotion. Même s’il est encore un peu gros, je m’habitue. Je retrouve des sensations. L’odeur du café. Celui des herbes aromatiques de mon jardin : le basilic, le romarin… Forcément, je respire mieux, puisqu’avant je vivais en apnée !
Autour de moi, tout le monde est content de ces changements. Je vais pouvoir vivre au grand jour. Aller au restaurant avec mon mari. Retravailler, j’espère… Avant d’être malade, j’étais assistante de direction. Mais j’ai été licenciée en 2017. Le regard sur moi, c’était trop dur. Mais maintenant, je vais pouvoir l’assumer. Il est prévu de me faire quelques retouches fin janvier. Je suis vraiment confiante et j’espère sincèrement que mon expérience pourra profiter à d’autres patients. Que ça leur donnera de l’espoir. Car c’est un grand pas en avant ! »
Propos recueillis par Céline Dufranc
Retrouvez l’interview du Pr Dupret-Bories juste ici.